Deux mouvements paradoxaux : quitter la foi infantile pour passer à une foi adulte (st Paul) et l’invitation de Jésus à devenir comme des enfants ! (st Marc) |
1- Une inspiration actuelle : David Ratte, Le Voyage des Pères |
Scenario.com : Le voyage des pères, ta dernière production, est sorti il y a peu. Pourrais-tu en parler un peu ? Comment t'es venue l'idée de te lancer dans cette aventure biblique ? A-t-il été nécessaire de te documenter, de demander conseil à des spécialistes ? David RATTE : Le sous-titre de cette série pourrait être : « Imaginons ensemble les coulisses de la Grande Histoire ». L’idée de base était d’essayer de savoir comment les familles des apôtres ont pu réagir face au phénomène Jésus. 2000 ans après, croyants ou non, on sait tous quelle importance ont eu ces évènements dans l’histoire de l’humanité. Mais ceux qui vivaient à l’époque n’en avaient aucune idée. Même les apôtres ne l’ont vraiment compris qu’après la mort du Christ. Je me suis dit qu’au lieu de braquer la caméra sur Jésus, il serait intéressant de la tourner un peu sur le côté. Et puis la question principale était : « Comment aurais-je réagi dans une situation pareille ? » |
L'auteur est incroyant dit-il ailleurs. Simplement il est ouvert à la force du texte biblique et se laisse travailler par lui sans savoir où cela le conduira. Il laisse grandir en lui l'inspiration jusqu'au moment où il sait que le temps est venu de créer et de produire. Sa parole est unique, irremplaçable. Il résonne en écho à la Parole éternelle et il est le seul à pouvoir engendrer une telle œuvre. |
David RATTE : Cette histoire était certainement déjà cachée dans un coin de ma tête sous une forme ou une autre. Après avoir terminé le 1er tome de Toxic Planet, j’ai parlé à Pierre PAQUET de mon envie d’entamer un projet très différent avec une histoire en plusieurs parties, avec des décors, des visages ( !) et une mise en scène plus libre. Je lui ai alors proposé plusieurs scénarios … mais je n’ai pas senti d’enthousiasme particulier pour ces histoires. Alors, je me suis creusé les méninges et un beau matin (sous la douche) l’histoire de Jonas et de ses copains m’est apparue comme une évidence. J’ai envoyé immédiatement un mail à Pierre (après m’être séché et habillé quand même) et je lui ai raconté mon histoire en 4 lignes. Il m’a immédiatement répondu : « J’achète !! ». Voilà ! Le « Voyage des pères » était né. Source : www.scenario.com |
David Ratte était loin d'imaginer l'écho que son œuvre allait avoir chez les croyants. S'appuyant sur un événement historique pour lequel il s'est soigneusement documenté, son inspiration a rencontré une communauté qui s'est laissé interpeller par la justesse de sa parole, lui donnant de facto quelque chose du prophète. Son "enfant" l'a beaucoup fait grandir ! |
2- Bible et Parole de Dieu |
Du texte à la Parole de Dieu :
Le judaïsme, le christianisme et l'islam peuvent être appelées des religions à "prophétisme historique". Toutes trois, en effet, se réfèrent :
Dans l'enluminure ci-dessous d'inspiration chrétienne, Isaac préfigure Jésus : le bois qu'il porte a la forme d'une croix, l'ânon évoque l'entrée messianique à Jérusalem et le bélier ressemble à un agneau. |
L'inspiration joue sur plusieurs niveaux : - Événement : la Parole/révélation est issue d'événements dont l'écho est gardé par des croyants et se traduit dans la vie de communautés Source : Les Seuils de la Foi, Université Catholique de Lille |
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Nous appelons "sacrifice d'Abraham" un épisode des histoires saintes qui, par une heureuse fortune, a une issue différente, car Isaac s'en tire. Même s'il est ligoté comme un chevreau sur un rocher et que son père, armé d'un couteau, est prêt à lui trancher la veine jugulaire, il est sauvé par Dieu à l'ultime et bon instant. Les Hébreux ne parlent pas de sacrifice pour lui, mais de aqedah, ligotage. C'est la grande humiliation d'Isaac. C'est un garçon docile et conscient de ses devoirs. Il fait un long chemin de jours avec son père en portant le bois du sacrifice du feu. Il sait qu'ils n'ont aucune bête du troupeau avec eux, il voit son père triste et sombre, alors que d'habitude il est toujours heureux de présenter une offrande sur l'autel, d'élever vers le ciel le parfum du sacrifice. |
Il demande à son père où est l'agneau, mais c'est pour entendre la voix d'Abraham, pour être réconforté par son assurance. En effet, il l'appelle d'abord, pour qu'il puisse lui répondre avec sa coutumière affection : "Me voici mon fils." Puis il pose une autre question et obtient une réponse qui confirme ses pressentiments: "Elohim s'occupera de l'agneau pour le sacrifice". Jamais jusqu'ici, les choses n'avaient été ainsi entre eux. A présent, Isaac sait. Et pourtant il avance, franchit le dernier pas vers l'autel, dépose le bois, aide à construire l'autel, à disposer correctement les fagots tout autour. Maintenant, c'est à son tour. Voilà que son père le ligote. Isaac ne réagit pas, ne réplique pas, mais comme il se sent humilié par ces liens, lui qui était monté jusqu'en haut par la seule force de sa volonté d'obéir en tout. Lui qui avait fait preuve en silence de tout le sacrifice dont on est capable quand on est jeune, il était traité comme une bête récalcitrante à l'abattoir. |
Il ne peut pas non plus réclamer d'être égorgé en homme libre, de collaborer jusqu'au bout. Le ligotage d'Isaac est le comble d'une obéissance qui sacrifie même sa propre dignité, qui accepte d'être mal comprise. Son père et lui sont une seule chose sur cette hauteur, mais ces liens les séparent. L'ange arrive enfin et le couteau pointé sur la gorge du fils servira à couper la corde. A la fin du chapitre, on lit le passage sur la généalogie de Nahor, frère d'Abraham (Gn 22, 20-24). Quelques femmes s'y trouvent nommées. Parmi elles, Rivka, Rébecca, qui sera l'épouse d'Isaac. Voici que l'Ecriture sainte annonce la récompense qui reviendra à Isaac pour sa libre offrande de soi en sacrifice et pour l'humiliation de son ligotage.
Erri De Luca, Noyau d'olive (Arcades Gallimard). |
3- Evangile Mc 9, 30-37 |
Evangile (Traduction BJ) | Questionnement | Correspondances |
Deuxième annonce de la Passion 30 Etant partis de là, ils faisaient route à travers la Galilée et il ne voulait pas qu'on le sût. 31 Car il instruisait ses disciples et il leur disait : "Le Fils de l'homme est livré aux mains des hommes et ils le tueront, et quand il aura été tué, après trois jours il ressuscitera." 32 Mais ils ne comprenaient pas cette parole et ils craignaient de l'interroger. |
Silence !
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Parler ou se taire ?
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Qui est le plus grand ? 33 Ils vinrent à Capharnaüm; et, une fois à la maison, il leur demandait : "De quoi discutiez-vous en chemin ?" 34 Eux se taisaient, car en chemin ils avaient discuté entre eux qui était le plus grand. 35 Alors, s'étant assis, il appela les Douze et leur dit : "Si quelqu'un veut être le premier, il sera le dernier de tous et le serviteur de tous." 36 Puis, prenant un petit enfant, il le plaça au milieu d'eux et, l'ayant embrassé, il leur dit : 37 "Quiconque accueille un petit enfant comme celui-ci à cause de mon nom, c'est moi qu'il accueille; et quiconque m'accueille, ce n'est pas moi qu'il accueille, mais Celui qui m'a envoyé."
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Parole révélatrice : Apocalypse
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Retour au sein maternel ?
L'affaire de la Vie c'est le passage par la mort baptismale pour l'engendrement du Fils de Dieu.
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Voici une étape neuve qu'inaugure un enfant. La voie qu'il propose a l'aspect bizarre d'une perte d'être. Se mettre à son école reviendrait à croire à l'Esprit qui nous porte et nous pousse à parler en écho mystérieux et unique à l'éternelle Parole qui nous travaille à l'intérieur. Cette voie nous est indiquée par l'Évangile comme une route initiatique, une méthode (méta odos = le chemin pour aller au-delà), du visible vers l'invisible, du sens de la lettre vers le sens de l'Esprit, du silence vers la parole, de l'enfant vers l'adulte. Cet Evangile donne deux perspectives apparemment opposées : la simplicité et la difficulté. |
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